Dickie, le loser né
Ne vous laissez pas abuser par ces histoires muettes teintées d’innocence, par ces jolies couleurs vives, par ces personnages qui ressemblent à des playmobils, les histoires de Dickie sont des petits bijoux d’humour noir.
Dickie, de son vrai nom flamand « Boerke » (petit paysan) est un antihéros qui accumule les tares et les défauts de l’espèce humaine. Il est veule, naïf, bête, lâche, opportuniste, égoïste, souvent pitoyable. Dickie est ce genre de type qui tirera forcement le mauvais numéro, celui qui fera le mauvais choix et foncera la tête la première dans le malheur et mourra à la fin de l’histoire. Bien sûr il ressuscitera dans l’histoire suivante, comme n’importe quel personnage de dessin animé, pour mieux courir vers le désastre suivant. Mais ne riez pas trop vite des déboires de Dickie, il est le symbole de nos défauts et de nos faiblesses.
A l’origine, Dickie était un tranquille paysan créé par Pieter de Poortere pour dénoncer les dérives d’une agriculture belge dévoyée à l’utilisation abusive de pesticides et hormones diverses. Puis au fil des ans et des histoires, il est devenu un personnage universel, seuls sont restés la grosse tête ronde et les moustaches. Dickie peut tout incarner : tour à tour un pirate sans scrupule , un prince pas très charmant , un de nombreux sosie de Saddam Hussein ou un astronaute étourdi. Quel que soit le personnage, Dickie n’a aucune conscience de comment fonctionne le monde.
Pieter de Poortere a un véritable don pour faire voler tous les mythes en éclat, pour multiplier les références. Personne n’est épargné, il piétine tout méticuleusement, savamment. Son imagination débordante lui permet de tout revisiter. L’Histoire, la religion ou la culture subissent les mêmes outrages de cruauté. Le dessin naïf au trait noir épais, les couleurs joyeuses ne font qu’accentuer l’effet recherché.
Pieter de Poortere grandit dans les Flandres belges non loin de la frontière avec les Pays-Bas. Sans doute inspiré par quelques figures locales, il y invente son personnage de Dickie en 2001. Il remporte d’emblée le prix du meilleur album néerlandophone de l’année. Il est révélé au public français grâce aux éditions Les Requins Marteaux. L’intégralité des aventures de Dickie est maintenant disponible chez Glénat.
Son travail est tellement populaire outre-Quiévrain que depuis 2014, il a une exposition permanente au Centre Belge de la Bande Dessinée à Bruxelles. Et selon les dernières nouvelles, une statue de Dickie fièrement assis sur son tracteur épandant du lisier serait à l’étude.